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À moins d’une
heure du moment fatidique, mon cœur battait à tout rompre, mes mains tremblaient
et je ne tenais plus en place. Mélita (son amie
pixie) me donnait des
conseils que je n’écoutais plus, Esteban finissait de mettre en place l’escorte
d’honneur et tout un chacun m’octroyaient leurs félicitations mais c’est à peine
si j’en avais conscience. Je commençais à me rendre compte de l’importance du
moment que je m’apprêtais à vivre et de la chance que j’avais. Je regrettai un
instant que ma sœur aînée et tous les miens qui étaient morts par la faute des
orcs ne puissent partager mon bonheur. Alors que la bruyante procession, formée
de mes compatriotes Rangers, une armée de pixies et de plusieurs de mes amis, me
soulevait avant de se mettre en marche ; je sentis la flamme de mon amour pour
Élora me réchauffer le cœur et me redonner courage. Mes peurs, mes craintes, les
doutes que les elfes avaient émis au sujet d’un mariage entre une elfe et un
demi-elfe ; tout cela était à présent bien loin de mes préoccupations. J’avais
momentanément oublié qu’un terrible conflit se préparait en Bryas, préférant me
laisser imprégner de l’esprit de la forêt d’Irendille.
Bien que je ressentis beaucoup de gêne lorsque mes compagnons me portèrent en
héros à travers le village afin de rassembler tous les invités ; je n’émis
aucune objection. En ces temps troublés, ils avaient trouvé une rare occasion de
festoyer et de sourire, je n’allais donc pas les arrêter. Dans leur
enthousiasme, ils nous menèrent même au cœur de l’arène, où de sanglantes
festivités avaient lieu, pour inviter les gens à venir fêter au lieu
d’encourager la violence. Le son des cors, des tambours et les cris de joie ne
s’atténuèrent que lorsque nous arrivâmes à l’orée de la forêt des elfes. Alors
que les invités descendaient le vallon dans une sérénité respectueuse pour le
peuple elfique, seule la flûte de Gaïa remplissait la tranquillité de la nuit
grâce à sa douce mélodie.
Puis, lorsque tous furent arrivés à l’intérieur de la clairière de Mieilliki
(c’est le nom que donnent les Rangers à la déesse de la nature), Esteban
souhaita la bienvenue à tous et demanda aux Rangers de former une haie d’honneur
pour les mariés. Lorsque les vaillants protecteurs d’Irendille eurent pointé
leur lame vers le ciel ; le meneur de chasse des Rangers appela les futurs
époux. Vêtu de mes plus beaux habits, les runes porte-bonheur des peintres-mages
ornant mon front, je marchai de solennel aux côtés de ma fiancée en direction de
la clairière tandis que Laênneck (chef du clan du Loup) ouvrait la marche.
Ébloui par la beauté radieuse de ma bien-aimée, je ne me rendis même pas compte
que derrière nous le clan du Loup au grand complet était venu célébrer et
j’étais incapable de faire disparaître mon grand sourire idiot. Alors que nous
marchions au centre de la haie d’honneur, les charmantes dames Rangers lancèrent
des pétales de fleurs et trois vivats furent criés en cœur par les invités.
Une fois rendu au niveau de Werra (la grande druide Rangers), nous nous
agenouillèrent devant les étendards elfiques et prirent quelques instants pour
nous recueillir. Personnellement, j’en profitai pour remercier Mieilliki de
toutes ses bontés et la priai de protéger ma future union. Par la suite, Werra
entreprit la lecture enflammée d’un magnifique texte offert par monsieur Setoh
Val de Gousset tout juste avant sa métamorphose. Puis, question d’être vraiment
en communion avec les esprits de la forêt avant d’unir nos destinées pour
l’éternité, les elfes nous mirent en garde une dernière fois, nous ont expliqué
à tous ce que représente la cérémonie du mariage chez les elfes et nous ont fait
boire l’essence même de la vie en Irendille ; l’eau de la fontaine d’Isaëlle
(reine d’Irendille) 1.
Finalement notre chère
druide, finit son discours chargé d’émotions et nous invita à procéder à
l’échange des anneaux. Le regard noyé dans celui de ma bien-aimée depuis un bon
moment déjà, je parlai avec plus de sincérité que jamais lorsque je lui promis
et jugeai de l’aimer pour l’éternité. Lorsqu’Élora fit de même à mon égard, je
bus littéralement ses paroles et ne m’aperçu même pas que la clairière baignait
à présent dans une lueur irréelle ; les pixies et lutins venaient d’ajouter leur
touche personnelle à la cérémonie. Lui enfilant son anneau au doigt, j’embrassai
avec dignité la plus belle des elfes entre les yeux, comme le veut la tradition
elfique. Alors qu’elle faisait de même, je ressentis une douce chaleur envahir
mon corps.
Nous étions enfin marié ! Je venais maintenant d’unir ma destinée à celle de la
plus merveilleuse elfe de Bicolline. Les formalités étant terminées, tout
s’étant déroulé de façon superbe dans une ambiance chaleureuse ; je me sentais
soudainement plus léger et exprimai ma joie de façon explosive. En effet,
j’embrassai passionnément mon épouse avec fougue et la soulevai dans les airs en
tournoyant sur moi-même.
Theuuuuuu ! Theuuuuuuu !
La vie est belle. Je me dois d’avoir foi en elle et de la protéger ; j’en avais
maintenant la certitude !
Un fier membre des Rangers et nouvel époux d’Élora Akimir,
Faucon Loyal
1 : Une légende raconte que lorsque l'eau de cette fontaine est bu par un couple
de nouveaux mariés et qu'ils n'en tombent pas malade; c'est qu'ils ont la
bénédiction de la reine d'Irendille.